Emmanuel Wüthrich

Passer 1

2011_passerboitesimges2011 Emmanuel Wüthrich

Emmanuel Wüthrich, octobre 2011

table et boîtes (acier et MDF), 32 x 119 x 88 cm dans les boîtes, 3652 cyanotypes, 10 années du 1er janvier 2002 au 31 décembre 2011 (le projet se poursuit)
images – cyanotypes, carte postale ancienne, papier sulfurisé, radiographie, trace de peinture à l’huile et impression jet d’encre (45 x 370 cm)

Un fil tendu entre l’avant et l’après,
une attention retenue, restituée.
Passer.
Sur une table, dix boîtes bleues. Neuf sont fermées et contiennent chacune 365 images (ou 366 pour les années bissextiles). Une boîte (2011) est encore ouverte. Chaque image est un cyanotype réalisé en 24 heures, depuis le 1er janvier 2002. Des traces de lumière retenue prisonnière d’une surface photosensible, dans une «boîte-appareil photographique» rudimentaire à grosse lentille. Elles témoignent d’un temps passé, d’un espace visé. Le rôle du photographe, dans ce processus, n’est autre que de décider le temps de la pose et la portion du monde qu’il souhaite rendre visible… ou re-présenter (dans un nouveau présent). Ce temps et cet espace, ici, sont continus, contenus. Un jour devient une image, une année se retrouve dans une boîte.
Un temps objectif, régulier, permanent.

Le cyanotype est une technique photographique ancienne très simple d’approche. Un apprêt photo- sensible appliqué au pinceau sur du papier permet de travailler l’exposition directe au rayonnement du soleil d’un objet (photogramme) ou film par contact (radiographie, négatif…). Les cyanotypes sont des négatifs. Les zones exposées, rincées et fixées à l’eau courante deviennent bleues (de Prusse). Le flou du point de vue présente une parcelle du ciel vu de la fenêtre de mon atelier. Des ciels négatifs. Et pourtant bleus. Parfois, les images sont brûlées par le point focal du soleil, quand il pénètre directement dans la boîte. Mémoire (des traces).
Derrière la table, 22 images alignées, souvent des cyanotypes. Des formats carrés et rectangulaires variés. Encore des traces – des taches parfois – pour rendre matériel l’immatériel. Pour donner une épaisseur à la fugacité. Proposer une verticalité à la fuite. Des moments d’éternités provisoires. Des pauses. Des arrêts devant le monde. Des effacements. Des joies, des douleurs, des moments pleins, des creux… ces courses, ces ruptures et ces silences qui rythment l’existence.
Un temps subjectif.
Des suspensions.